« D’eau et de lumière »
Bertrand Bolognesi
12/10/2013 au 16/11/2013
Bertrand Bolognesi, artiste né à Paris en 1965, signe ici sa première exposition à la galerie.
vingt encres novembre 2012 – Paris IX Galerie la Passerelle
« Mon travail régulier sur toiles de grands formats, effectué à l’huile ou à l’acrylique, se ponctue d’heures de “méditation furieuse“ avec le papier et l’encre, sur des espaces limités. La contrainte est extrême, car les encres – toutes végétales (issues de divers sucs), ce qui pourrait inciter à les labelliser bio – induisent une anticipation des réactions aquatiques, des séchages, des rencontres et autres altérations du geste dans le temps qui le poursuit. À considérer le support, je choisis le papier, bien sûr, mais encore l’imbibe, le gratte, le macère, frotte, façonne, triture, érode, en toute connaissance de cause, afin d’y mieux savourer ensuite le chemin de l’encre, mais aussi du thé, du café, du vin, etc., des particules elles-mêmes, auréoles et irisations.
Dans mon œuvre, toutes techniques confondues, on croise les mots. Mots, ou lettres, phrases et divers autres signes, amorcent un dessin qui ne tend qu’à s’échapper dans la noyade, toujours, superposant ses reliefs en des perspectives illusoires. Mille choses proclamées dans ces volutes, mille choses illisibles comme autant de déclarations effectives et masquées.
Ici, nul projet : rien que l’instant, à observer en acceptant l’urgence de s’y laisser guider. Car l’encre est impérative, et tous ceux qui la pratiquent s’y soumettent, d’une manière ou d’une autre ! Les titres ? D’impuissantes sudations, forcément… » BB
août 2009 – Abbaye de Silvacane (Bouches-du-Rhône)
nein, Ihr…¡, installé dans le cadre de l’exposition Quinze regards sur Guernica
« C’est un truisme que de parler d’horreur historique : on le sait, l’histoire, toujours, est horrible. Son goût du forfait invente chaque jour de nouveaux ravages. Guernica fut détruite. Ceux de mon âge l’ont su dès que les maîtres ont estimé qu’ils étaient en âge de le savoir ; à moins que nous l’ayons su par nous-mêmes – je ne sais plus. La tête le sut, en tout cas. La fameuse toile a bien mieux transmis 1937 qu’aucune école. L’indignation ? Il serait naïf de la croire transférable, actualisable. Dans un regard sur Guernica, œuvre peinte aujourd’hui, le choc ne saurait venir ni de l’histoire ni de la référence. Nein… ihr ¡ (ponctuation volontairement incorrecte, dans l’espoir d’une fin), aurait-pu dire l’autre, dans cette distance aimable d’une improbable traduction que put m’inciter l’anecdote, si discrètement non vérifiée. Plus de silhouettes, ici, tout juste quelques ombres cauchemardées qui entrent, sortent et entrent encore du cadre au noir hésitant. Et soudain l’empreinte recréée… Voilà une quinzaine d’années que ma peinture écrit : tout est dit ? quémanderaient les galets du temps. » BB
février 2008 – Le Vigan (Gard)
douze toiles installées dans l’exposition Cows, Dogs ans Co
« Dans les années quatre-vingt, il cherche son expression dans l’abstraction, explorant des effets de texture et de poli. Deux grandes séries naissent alors : Damiers marins et Verbes, où il commence à écrire sur la toile. Les lettres se défont, les signes s’interpénètrent, les langues se mêlent, le sens séduit et se cache. Sans revenir à la figuration, Bolognesi porte plus tard ses volumes vers le nu, ses personnages évoluant alors dans des mondes incertains issus des œuvres précédentes. De fait, comme certains squelettes animaux, son travail gardera toujours trace des différentes périodes explorées, mettant à portée d’œil une sorte de théorie de l’évolution qui, pour respectueuse de sa propre préhistoire, n’en sanctifie que plus l’invention d’une mythologie personnelle, sertie dans un palimpseste de superpositions. Geste expressif et couleurs vives commandent un panthéon païen où est reçue, à partir de 1998, la masse musculaire bovine et les nombreux plis engendrés dans le volume par son poids. Vaches et hommes conduisent dès lors le chemin interne à la forme, dans une écriture de la coulure. Non sans humour, les titres foisonnent, obéissant à une narration plastique déduite plutôt que développée. » Martial Surris
« D’eau et de lumière » Bertrand Bolognesi